- Église Saint-Pierre, Tulle - du 21 juin au 12 août
- Centre international d’art et du paysage, Vassivière - du 6 juillet au 2 novembre
Depuis 2011, Peuple et Culture Corrèze travaille étroitement avec le groupe RADO, collectif qui réunit 9 jeunes artistes aux pratiques diverses, de la photographie à la sculpture, en passant par la vidéo et le dessin. Tous partagent un intérêt pour les formes et les conditions d’une pratique collective de l’art, parallèlement à l’activité qui structure leurs recherches personnelles. Leur travail dépasse les limites de l’art contemporain et se préoccupe de l’état du monde.
Entre la commande publique traditionnelle et l’œuvre dite autonome, Peuple et Culture explore une troisième voie : celle d’un art rattaché à l’espace public par des procédures de participation et d’échanges, et capable dans le même temps de produire des formes exemplaires.
Des résidences d’artistes en forme d’invitation à porter un regard sur la ville et ses habitants. Des projets qui émanent d’un territoire précis, des formes artistiques qui induisent de la reconnaissance et des rapports d’étrangeté, des décalages, des lignes de fuite. Un travail artistique qui, justement parce qu’il part du local, de l’intime, peut atteindre une valeur générale, parler à d’autres ailleurs et fonctionner pour et hors du lieu précis où il a été conçu.
Le groupe RADO rassemble actuellement Fanny Béguery, Madeleine Bernardin Sabri, Florian Fouché, Adrien Malcor, Anaïs Masson, Marie Preston, Maxence Rifflet, Claire Tenu, Antoine Yoseph.
Ce qui ne se voit pas
les textes ci-dessous ont été piochés sur le site du Groupe RADO
« En 2011, par la voix de Manée Teyssandier, Peuple et Culture nous invitait à nous intéresser « au présent et au futur » du pays de Tulle, en privilégiant les occasions de travailler avec ses habitants. Nous avons choisi d’aborder le territoire par ses réseaux techniques (énergie, déchets, transports, etc.) : le plus souvent invisibles alors même qu’ils structurent notre vie quotidienne, ils sont de plus en plus objet de luttes et de débats. Il y avait là un défi documentaire : comment avec de la vidéo, du dessin, des photographies, des sculptures, révéler des réalités cachées, ou mal regardées, tout en indiquant des réserves d’invisible ? De ces questions et des enquêtes que nous avons conduites se sont dégagées plusieurs situations. »
Enfantillages outillés www
Fanny Béguery et Adrien Malcor ont mis en place un atelier mobile avec des élèves de trois écoles primaires situées de part et d’autre de la Dordogne. Ils ont donné aux enfants des outils artistiques, ceux du dessin, de la photographie et de la gravure, pour qu’ils imaginent ou réinventent le fonctionnement des machines qui les entourent, des objets domestiques aux grandes installations hydroélectriques tapies dans leur voisinage.
Forêt-machine www
Madeleine Bernardin Sabri a enquêté sur la gestion sylvicole du plateau de Millevaches. Photographe, elle a pris le temps de lire le paysage et a assisté à des coupes rases ; elle a rencontré ceux qui activent des réseaux de chaleur locaux et évitent de faire appel aux entreprises qui exploitent la forêt comme d’autres prélèvent du pétrole. Elle a participé à la réalisation d’un Rapport sur l’état de nos forêts et leurs devenirs possibles conçu par des habitants, et a peint deux cartes sur verre en cherchant la juste traduction des différences d’échelle vertigineuses entre exploitation locale et gestion industrielle du bois.
Ouvriers des réseaux www
Maxence Rifflet et Antoine Yoseph ont filmé des ouvriers d’un centre de tri des déchets près d’Argentat. Ils ont saisi l’occasion rare (permise par la détermination d’un élu) de filmer le travail, tel qu’il a lieu. Ils ont cherché à rendre compte – sans commentaire, par le montage, au plus près des corps – des gestes d’une dizaine d’hommes et de femmes qui trient des « déchets propres ». Parallèlement, ils ont photographié l’activité de ceux qui enfouissent des câbles en forêt, élaguent des pins près de lignes à haute tension, inspectent des canalisations d’eau de pluie, veillent au fonctionnement d’une micro-centrale…
Autonomie www
Marie Preston a mené une série d’entretiens filmés avec des personnes installées en Corrèze, soucieuses de vivre à l’écart des réseaux centralisés, sans dépense énergétique superflue, proches de la nature. Quelles inventions, quels modes de vie, quelles contradictions suscite ce désir d’« autonomie » ? Elle a réalisé deux films : le premier mêle les portraits de deux hommes de générations différentes qui prônent la cohérence et de manière plus dissensuelle la sobriété et l’apport du collectif ; le second, plus court, se concentre sur une maison faite d’arbres coupés au lendemain d’une tempête.
L’air de l’accordéon www
Claire Tenu et Fanny Béguery proposent une divagation sonore et visuelle, suscitée par la présence de la fabrique d’accordéons Maugein à Tulle et leur intérêt pour l’instrument. À partir d’une analogie avec l’appareil photographique, et d’un jeu sur l’air, entendu comme mélodie et comme souffle, elles présentent trois œuvres qui correspondent à trois temps du projet : un montage audiovisuel fait de photographies, de lectures, d’entretiens, d’études filmées et de musique ; un petit lamellophone ; et une installation imaginée pour le phare de Vassivière.
Plate-forme multimodale www
Florian Fouché, Adrien Malcor, Marie Preston et Antoine Yoseph se sont concentrés sur le quartier de la gare de Tulle, récemment devenu ce que le jargon urbanistique appelle une « plate-forme multimodale » : une zone d’échanges entre les différents réseaux et moyens de transport. En 2011, le monument au sergent Charles Lovy, pauvre héros tulliste des guerres coloniales tué en 1903 dans le Sud-Oranais, fut réinstallé sur l’ancien square du Souvenir français, au cœur de ce qui est aussi le « quartier des martyrs » du 9 juin 1944. Observant combien une opération de rénovation urbaine peut occulter des enjeux mémoriels, les quatre artistes ont transposé ce point clé de Tulle sur une scène d’images et d’objets qui ménage une place au citoyen regardeur. Parallèlement, Florian Fouché propose deux œuvres : Lumières pendues, un ensemble de photographies réalisé en mémoire des hommes pendus par les nazis dans les rues de la ville ; et un objet photographique qui dialogue avec l’extraordinaire contre-monument d’Antoine Paucard, Le franc-tireur 1870-1944, situé dans un bois près de Saint-Salvadour.
Projet réalisé avec le concours du ministère de la Culture et de la Communication (Direction régionale des Affaires culturelles du Limousin), de la Ville de Tulle, du Conseil régional du Limousin, de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, de la Caisse des dépôts et consignations, de l’ONACVG, de l’École nationale supérieure des beaux-arts et du programme doctoral SACRe de l’université Paris Sciences et Lettres.